Performance en continu le samedi
« Dehors ça glougloute, derrière là-bas, ça fait du bruit liquide que je ne comprends pas. J’entend un truc, c’est clair, mais je pige pas ce que j’entend, c’est du liquide, c’est in-préhensible, je m’sens con, j’sais pas d’où ça vient alors j’erre. Je follow discret des petits groupes avec mon smartphone en guise de calepin, genre j’suis Tintin sans son Milou. J’vois des gentes qui se massent à l’arrière du hangar, dans un coin où personne ne va trop d’habitude. C’est un rideau de fougères, un rideau de fougères sèches qu’il faut franchir pour découvrir une table ronde faite avec une bobine de câble et de quelques chaises sur lesquelles des gentes se sont assix. Au fond de ce couloir me viennent les accords d’une musique, qui en ce lieu paraît irréel. Coincé entre la grange et le talus un autre rideau de fougères au travers duquel on peut voir le masque de cette étrange créature entr’aperçue tout au long de l’après midi : l’insaisissable humanoïde croisé oiseau tropical au long bec dont la tête désormais séparée du corps trône et me dévisage depuis ses orbites creuses. Son ancien porteur je ne le vois pas, caché par le rideau de fougères il tape sur ses fûts de batterie, accompagné d’une musique qui doit sortir d’enceintes. Il règne une ambiance de rituels, de secrets, de cabales. J’ai du mal à me rapprocher, il y a beaucoup de monde. Au travers des épaules, je fixe mon attention sur le masque qui me rappelle un peu celui des médecins de la grande peste. Je me décide à écouter d’un peu plus loin. Ma batterie se vide à toute vitesse. Assis en hauteur, face à la crèche, je profite de la musique et du ballet incessant des spectateurices qui se font des politesses à l’entrée du terrier de la créature secrète. »
→ retrouvez ici l’intégralité du texte de Robin Garnier-Wenisch